jeudi 30 août 2012

Projet du Schéma de développement du tourisme de Lorraine : nos remarques et nos propositions


Un travail d’inventaire de propositions et d’idées intéressant (1) mais il s’agit d’abord de grandes orientations concernant quelques grandes communes de Lorraine. Dans quelle mesure les élus collectivités territoriales et de moyennes et petites collectivités locales, les acteurs associatifs (associations d’élus, associations de patrimoine), les autres acteurs institutionnels (ABF, Convention Interrégionale du Massif des Vosges, VNF, CAUE, etc.) ont-ils participé à ce schéma ? Quel a  été leur apport dans ces orientations ? Y a-t-il eu discussions avec les acteurs économiques du tourisme thermal ? Ces orientations sont-elles en accord avec le CPER Lorraine et la nature des projets à financer par les fonds européens (Feder) dont la partie Ouest des Vosges par exemple est seule bénéficiaire ?

Certes, « les possibilités de développer un tourisme vert (ndlr : ex. dans les Vosges) sont réelles. L’eau, la montagne et les paysages en sont à la base. Il dépend donc étroitement du maintien de la qualité de l’environnement et de ses ressources: étangs, lacs, rivières et canaux, forêts, montagne vosgienne et ses bordures. »  Mais il est impossible de dissocier « l’eau, la montagne et les paysages » du patrimoine bâti car il s’agit d’un tout.

Les sujets de la restauration et la réhabilitation du patrimoine bâti privé et public, à l’origine de l’harmonie paysagère des villages de France appréciée des touristes, doivent être sérieusement abordés en amont de telles orientations.  De nombreux villages vosgiens par exemple sont en déshérence et en très mauvaise situation d’offrir des hébergements (6/41 : « Contribuer au soutien du développement d’une offre d’hébergements haut de gamme / familiale et rurale / insolite adaptée aux besoins des territoires » alors que leur paysage et les alentours sont des richesses inexploitées. La sensibilisation des élus et des habitants est une priorité et les préconisations sur la qualité, l’harmonie dans la réhabilitation du bâti ou des clôtures dans les PLU locaux ou cartes communales une nécessité.

 Les CAUE (Conseils départementaux en aménagement, urbanisme et environnement pour les élus et les particuliers) sont des appuis remarquables (ex. Caue 60 Oise, Caue 83 Var) ; leurs publications gratuites en ligne (cahiers de recommandations architecturales, guides sur la réhabilitation du patrimoine bâti, ex. restauration des façades), sont insuffisamment valorisées auprès des habitants. Inviter les Conseils Généraux à engager des actions de partenariat avec les CAUE tendant à valoriser le patrimoine local, les centres historiques des villages et définir les zones avec les communes concernées serait une orientation concrète pour une nouvelle politique du tourisme.

Certaines rues sont bordées de maisons ou d’immeubles inoccupés et menaçant ruine. Rappeler et soutenir les élus dans l’exercice de ce pouvoir de police (articles L 2211-1, L 2212.2 et L 2213-24 du Code Général des Collectivités Territoriales, articles L 511-1 à L 511-6 et R 511-1 à R 511-5 du Code de la Construction et de l'Habitation) serait  aussi une orientation concrète.

Les inondations, naturelles ou dûes à un mauvais entretien des berges et des lits des cours d’eau découragent les habitants de moderniser leur habitat en vue de le proposer en chambres d’hôtes ou à la location. La Lorraine étant fortement concernée par les catastrophes naturelles, les remarques ci-dessus sont identiques. Les Vosges par exemple, sont concernées par deux bassins, Rhin-Meuse et Rhône-Méditerranée pour la partie sud du territoire départemental (Bains les Bains, Fontenoy-le-Château, ...). Mieux prendre en compte les incidences des catastrophes naturelles sur l'habitat et mieux informer les habitants et résidents secondaires les aiderait à concrétiser plus durablement leurs projets de réhabilitation ou de restauration.

La sensibilisation des jeunes générations par un travail en équipe entre professionnels du CAUE et des professeurs des collèges (ex. en Haute-Saône) permettrait  à ces dernières de s’approprier l’importance de l’environnement bâti, indissociable d’une éducation à la seule biodiversité. Créer des partenariats avec l’Education nationale sur la base de la circulaire 2002-086 (NOR : MENE0200882C) « Mise en œuvre du plan pour l'éducation artistique et l'action culturelle à l'école - Chartes pour une éducation au patrimoine "Adopter son patrimoine" (2) serait aussi une orientation non seulement concrète mais un signe visible de la volonté de considérer la jeunesse comme partie prenante à l’intérêt patrimonial de leur village. Certaines associations, remarquables (ex. Amis du Vieux Fontenoy) y travaillent mais les acteurs de l’Education nationale sont indispensables à la valorisation du patrimoine local.

Enfin, qu’entend-t-on par « tourisme social et solidaire » ? Une politique résolument touristique comprend la proposition d’hébergements pour toutes les bourses. Cette orientation, pavée de bonnes intentions, n’explicite pas le contenu réel des intentions et peut s’avérer contre-productive.

En marge de ces remarques, il faut aussi signaler que le traitement des déchets fait aussi partie de l’accueil des touristes (et des résidents secondaires). Or, il est fréquent de ne pas trouver un seul réceptacle dans les communes lorraines pourtant fréquentées (ex. port de plaisance de Fontenoy-le-Château). Ce sujet est un vrai sujet car il y a urgence en matière de salubrité publique (déchets en forêt, dans les canaux, …).




(2) Résumé : mettre les élèves au contact direct de professionnels de l’architecture, de leur donner des outils de lecture qui leur permettent de porter un regard averti sur ce qui les entoure l’école n’a que faiblement pris en compte toutes ces dimensions dans la formation générale des élèves. Notre système scolaire a, en effet, trop souvent réduit la sensibilisation à l’architecture à une présentation de monuments représentatifs des grandes civilisations. C’est pourquoi on observe aujourd’hui avec intérêt le développement de démarches pédagogiques qui visent à entrecroiser de manière féconde exploration plastique, analyse des techniques, place dans l’histoire, enquête sur les conditions de réalisation, attention au développement urbain, bref à tout ce qui donne forme et sens au bâti)

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